Se faire en galant homme une plus douce image, |
|
Comment
|
Écoute, si tu m'importunes davantage de tes sottes moralités, si tu me dis encore le moindre mot là-dessus, je vais appeler quelqu'un, demander un nerf de bœuf ; te faire tenir par trois ou quatre, et te rouer de mille coups ; m'entends-tu bien ? |
|
Question
|
C'en est fait, je me rends, et suis prête à tout faire. |
|
Comment
|
Je dis que l'on doit faire ainsi qu'au jeu de dés, |
|
Comment
|
non, non, la naissance n'est rien où la vertu n'est pas ; ainsi nous n'avons part à la gloire de nos ancêtres qu'autant que nous nous efforçons de leur ressembler, et cet éclat de leurs actions qu'ils répandent sur nous, nous impose un engagement de leur faire le même honneur, de suivre les pas qu'ils nous tracent, et de ne point dégénérer de leurs vertus, si nous voulons être estimés leurs véritables descendants. |
|
Comment
|
Et je déclare, moi, que je prétends le faire, |
|
Comment
|
Et moi je n'en voudrais avec eux faire aucune : |
|
Comment
|
Laissez-moi faire, je m'y en vais moi-même. |
|
Comment
|
Ni faire aucun semblant que je serai derrière. |
|
Comment
|
Oui, vous me voyez revenu de toutes mes erreurs, je ne suis plus le même d'hier au soir, et le Ciel tout d'un coup a fait un changement qui va surprendre tout le monde, il a touché mon âme et dessillé mes yeux, et je regarde avec horreur le long dérèglement où j'ai été, et les désordres criminels de la vie que j'ai menée ; j'en repasse dans mon esprit toutes les abominations, et m'étonne comme le Ciel les a pu souffrir si longtemps, et n'a pas vingt fois sur ma tête laissé tomber les coups de sa justice redoutable ; je vois les grâces que sa bonté m'a faites en ne punissant point mes crimes, et je prétends en profiter comme je dois, faire éclater aux yeux de tout le monde un soudain changement de vie, réparer le scandale de mes actions passées, et m'efforcer d'en obtenir du Ciel une pleine rémission ; c'est à quoi je vais travailler, et je vous prie, Monsieur, de vouloir bien contribuer à ce dessein, et de m'aider vous-même à faire un choix d'une personne qui me serve de guide, et sous la conduite de qui je puisse marcher sûrement dans le chemin où je vais entrer. |
|
Comment
|
Il y a bien quelque chose là-dedans que je ne comprends pas ; mais quoi que ce puisse être, cela n'est pas capable ni de convaincre mon esprit ni d'ébranler mon âme, et si j'ai dit que je voulais corriger ma conduite, et me jeter dans un train de vie exemplaire, c'est un dessein que j'ai formé par politique, un stratagème utile, une grimace nécessaire où je veux me contraindre pour en ménager un père dont j'ai besoin, et me mettre à couvert du côté des hommes de cent fâcheuses aventures qui pourraient m'arriver ; je veux bien Sganarelle t'en faire confidence, et je suis bien aise d'avoir un témoin du fond de mon âme, et des véritables motifs qui m'obligent à faire les choses. |
|
Comment
|
Pour vous faire tenir ce qu'on vous a promis. |
|
Comment
|
Il n'y a plus de honte maintenant à cela, l'hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour des vertus, le personnage d'homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu'on puisse jouer, aujourd'hui la profession d'hypocrite a de merveilleux avantages, c'est un art de qui l'imposture est toujours respectée, et quoiqu'on la découvre on n'ose rien dire contre elle, tous les autres vices des hommes sont exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement, mais l'hypocrisie est un vice privilégié qui de sa main ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d'une impunité souveraine ; on lie à force de grimaces une société étroite avec tous les gens du parti, qui en choque un se les jette tous sur les bras, et ceux que l'on sait même agir de bonne foi là-dessus et que chacun connaît pour être véritablement touchés, ceux-là dis-je sont toujours les dupes des autres, ils donnent hautement dans le panneau des grimaciers, et appuient aveuglement les singes de leurs actions : combien crois-tu que j'en connaisse qui par ce stratagème ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, qui se sont fait un bouclier du manteau de la religion, et sous cet habit respecté ont permission d'être les plus méchants hommes du monde ; on a beau savoir leurs intrigues et les connaître pour ce qu'ils sont, ils ne laissent pas pour cela d'être en crédit parmi les gens, et quelque baissement de tête, un soupir mortifié et deux roulements d'yeux rajustent dans le monde tout ce qu'ils peuvent faire ; c'est sous cet abri favorable que je veux me sauver et mettre en sûreté mes affaires, je ne quitterai point mes douces habitudes, mais j'aurai soin de me cacher et me divertirai à petit bruit, que si je viens à être découvert, je verrai sans me remuer prendre mes intérêts à toute la cabale, et je serai défendu par elle envers et contre tous ; enfin c'est le vrai moyen de faire impunément tout ce que je voudrai, je m'érigerai en censeur des actions d'autrui, je jugerai mal de tout le monde et n'aurai bonne opinion que de moi ; dès qu'une fois on m'aura choqué tant soit peu je ne pardonnerai jamais, et garderai tout doucement une haine irréconciliable ; je ferai le vengeur des intérêts du Ciel, et sous ce prétexte commode je pousserai mes ennemis, je les accuserai d'impiété, et saurai déchaîner contre eux des Zélés indiscrets qui sans connaissance de cause crieront en public après eux, qui les accableront d'injures, et les damneront hautement de leur autorité privée, c'est ainsi qu'il faut profiter des faiblesses des hommes, et qu'un sage esprit s'accommode aux vices de son siècle. |
|
Comment
|
De vous faire aucun mal, je n'eus jamais dessein, |
|
Comment
|
Jamais, en toute chose, on n'a vu si bien faire. |
|
Comment
|
Vous croyant un obstacle à faire mon salut. |
|
Comment
|
Ce n'est point mon humeur de faire des éclats ; |
|
Comment
|
Et pour faire autrement, j'ai les miennes aussi. |
|
Comment
|
Et crois que vous la taire, est vous faire une offense. |
|
Comment
|
Cherche à faire du mal à celui qui le flatte. |
|
Comment
|
Moi, point du tout, quel mal cela vous peut-il faire ? |
|
Question
|
Vous faire de mon bien, donation entière. |
|
Comment
|
Et c'est faire, Monsieur, ce que le Ciel ordonne : |
|
Comment
|
Cette donation qu'il a voulu me faire, |
|
Comment
|
C'est vous faire, sans doute, un assez libre aveu, |
|
Comment
|